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Arrêter des auteurs de traite pour rompre l'emprise sur des personnes mineures

Suite à la répétition d’actes de délinquance sur le secteur de Trocadéro, le Parquet de Paris s’est autosaisi et la section criminalité organisée du Parquet a mené une enquête sur plusieurs mois.

Les officiers ont constaté que des majeurs contraignaient des enfants à commettre des délits après les avoir incités à la consommation de produits stupéfiants.

L’instruction va commencer dans les semaines à venir et les auditions des auteurs et des victimes sont prévues.

Dans cette affaire, 7 auteurs majeurs ont été arrêtés le 13 juin 2022. Ils sont accusés de traite des êtres humains à des fins de criminalité forcée. Une quinzaine d’adolescents en errance en provenance d’Afrique du nord étaient victimes de cette exploitation.

Une affaire symptomatique du phénomène d’exploitation de mineurs en errance contraints à des actes de délinquance

Les victimes de cette affaire sont des Mineurs Non Accompagnés. Ils ont rencontré les exploiteurs sur le territoire parisien. Les auteurs ont perçu leur vulnérabilité et leur isolement et s’en sont servi pour les exploiter en accentuant leur emprise par le don de stupéfiant.

Cette affaire fait écho au plaidoyer mené par Hors la Rue depuis plusieurs années, dénonçant le fait que des enfants, qui ne consomment pas au départ de stupéfiants, tombent ensuite dans l’addiction car des adultes leur fournissent du Rivotril ou du Lyrica pour exercer leur emprise sur eux, avec pour finalité de les contraindre à commettre des délits.

Le traitement médiatique de cette affaire n’est pas adapté. Il évoque en effet l’exploitation de mineurs par des adultes tout en mentionnant les faits de délinquance des Mineurs Non Accompagnés comme s’ils en étaient responsables.

Il est donc important de souligner que ces délits sont effectués par des adolescents sous la contrainte d’adultes utilisant leurs addictions pour exercer une emprise sur eux, ce qui va tout à fait dans le sens des conclusions de l’enquête sur cette affaire.

Le devenir des victimes

Pour les services enquêteurs, la priorité est d’éloigner les victimes dans un lieu sécurisant et de pouvoir favoriser leurs auditions ensuite en lien avec la structure d’accueil.

Cependant, l’adhésion de ces jeunes à la mise à l’abri proposée est difficile à obtenir.
A ce stade, ils n’ont pas forcément conscience des dangers qu’ils encourent car ils sont toujours sous l'emprise de stupéfiants.

Ils ont premièrement besoin d’un suivi médical adapté pour gérer la période de sevrage.

Or, en France, peu de dispositifs d’accueil sont aptes à proposer ce type d’accompagnement.

Par ailleurs, ces jeunes ont subi des menaces, des représailles, des violences physiques au cours de l’exploitation.

Ils ont donc besoin d’être accompagnés sur le plan psychologique afin de s’exprimer pour évacuer les traumatismes et se stabiliser avant d’envisager de coopérer avec la Police lors des auditions.

Mais toutes les structures d’accueil classiques ne possèdent pas de psychologue spécialisé sur les impacts de la criminalité forcée.

C’est pourquoi le développement de centres d’accueil dédiés au mineurs victimes de traite, travaillant en lien avec des professionnels de santé et des psychologues spécialisés sur les questions de criminalité forcée, est essentiel pour favoriser la coopération des victimes avec la Police, élément indispensable dans la lutte contre cette forme de traite.

Association Hors la Rue

Objectif
Depuis 2004 Hors la Rue a pour objectif d’accompagner les mineurs étrangers en danger vers le droit commun (parmi lesquels des mineurs présumés victimes de traite des êtres humains)

3 missions principales
Repérer les mineurs étrangers en danger,
Accompagner les jeunes vers le droit commun
Participer à une meilleure connaissance et prise en charge des problématiques des jeunes que nous accompagnons.

3 modalités d’actions
Des maraudes quotidiennes effectuées par une équipe pluridisciplinaire sur les lieux d’activité, de pause, d’errance et de vie.
Un centre d’accueil de jour.
Des permanences psychosociales en détention auprès de mineurs que nous avons déjà rencontrés en rue, en partenariat avec la Protection  Judiciiare de la Jeunesse.
 


Article écrit en collaboration avec Julie Jardin, chargée de mission de lutte contre la traite des êtres humains à Hors la rue.