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Communiqué de Presse du Parlement Européen, novembre 2010

Une prévention plus rigoureuse, des peines plus sévères pour les trafiquants et une meilleure protection pour les victimes sont les objectifs clés d’une nouvelle législation européenne sur la traite des êtres humains, fruit d’un accord entre les représentants du PE et du Conseil, approuvée en commission ce lundi.

La nouvelle loi s’appliquera à la traite dans l’industrie du sexe ou à l’exploitation au travail, par exemple dans la construction, l’agriculture ou les services domestiques.

Plusieurs centaines de milliers de personnes sont victimes de la traite dans l’UE chaque année. De nombreuses victimes sont exploitées en vue de la prostitution (43%, en grande majorité des femmes et des filles) ou de tâches subalternes (32%).

La nouvelle directive, approuvée par les commissions des libertés civiles et des droits des femmes ce lundi, établit des règles minimales pour la définition des infractions pénales et des sanctions pour les trafiquants. La législation introduit également des règles communes afin de renforcer la prévention du crime et la protection des victimes.

"Les négociations ont été difficiles mais nous estimons que nous avons obtenu de bons résultats et atteint les points les plus important pour le Parlement. Avec cette proposition, nous allons créer un environnement plus difficile pour les trafiquants d’êtres humains et une meilleure protection pour les victimes", a déclaré le rapporteur de la commission des libertés civiles Anna Hedh (S&D, SE), qui a piloté la proposition pour le Parlement avec Edit Bauer (PPE, SK) rapporteur de la commission des droits des femmes.

"La plus grande réussite à mon avis est que cette nouvelle directive crée un environnement dissuasif pour les trafiquants et assure l’assistance et la protection des victimes de la traite, en particulier pour les enfants. En dépit du fait que nous avons dû renoncer à certaines questions qui figuraient dans notre proposition initiale, je suis convaincue que le résultat obtenu est bon et que la directive adoptée permettra de créer une base juridique meilleure comparativement à l’ancienne décision-cadre 2002/629", a ajouté Mme Bauer.

De nouvelles règles pour couvrir d’autres formes d’exploitation

Le texte adopte une vision plus large de la traite des êtres humains par rapport à la décision-cadre de l’UE de 2002 (qu’il est appelé à remplacer) et comprend d’autres formes d’exploitation, conformément à la demande des députés.

"L’exploitation" comprend désormais, au minimum, l’exploitation de la prostitution d’autrui ou d’autres formes d’exploitation sexuelle, le travail ou les services forcés, y compris la mendicité, l’esclavage ou les pratiques analogues à l’esclavage, la servitude, l’exploitation d’activités criminelles, ou le prélèvement d’organes. La définition couvre également le trafic des êtres humains à des fins d’adoption illégale ou de mariages forcés.

"L’exploitation des activités criminelles" signifie l’exploitation d’une personne en vue de commettre, par exemple, le vol à la tire ou à l’étalage, le trafic de drogue et d’autres crimes qui font l’objet de sanctions et impliquent un gain financier.

Sanctions durcies pour les trafiquants et produits confisqués

La nouvelle directive définit à l’échelle de l’UE des peines maximales d’au moins cinq ans d’emprisonnement (ce qui signifie que les États membres ne pourront imposer des plafonds inférieurs) ou, dans certaines circonstances aggravantes, de dix ans d’emprisonnement.

Ces circonstances aggravantes correspondent à des cas où des enfants ont été exploités, des organisations criminelles impliquées, la vie de la victime menacée ou de graves violences ont été utilisées. L’incitation, la complicité ou tout simplement la tentative de commettre une telle infraction sera également punissable.

Lorsque des personnes morales (organisations) sont impliquées, les sanctions devraient inclure des amendes pénales ou non pénales et pourraient inclure d’autres sanctions telles que l’exclusion du bénéfice de prestations ou d’aides publiques, l’interdiction temporaire ou permanente d’exercer des activités commerciales et la mise sous contrôle judiciaire, la supervision ou la fermeture temporaire ou définitive d’établissements.

Les États membres devraient également veiller à ce que les instruments et produits de ces crimes soient saisis et confisqués. Ils sont également "encouragés" à les utiliser pour soutenir l’aide et la protection des victimes, notamment une indemnisation.

Une plus grande protection pour les victimes

Les victimes doivent bénéficier d’un hébergement, d’une aide matérielle et des traitements médicaux nécessaires, y compris l’assistance psychologique, des conseils et des informations, estiment les députés. Le conseil juridique et la représentation juridique devraient être gratuits, du moins lorsque la victime n’a pas de ressources financières suffisantes. Les victimes de la traite doivent également avoir accès à des programmes de protection des témoins et à des régimes d’indemnisation.

L’assistance et le soutien devraient être accordés "avant, pendant et durant une durée appropriée après la procédure pénale", quelle que soit la volonté d’une victime d’agir en tant que témoin. Le texte inclut explicitement de ne pas poursuivre les victimes de la traite des êtres humains ou de ne leur infliger des sanctions pour avoir pris part à des infractions.

Décourager la demande

Les députés ont estimé que conférer le caractère d’infraction pénale au fait d’utiliser sciemment les services d’une personne victime de trafic pourrait avoir un effet préventif puissant en décourageant la demande.

Toutefois, le texte convenu avec le Conseil ne fait qu’"encourager" de telles mesures. Les États membres "envisagent de prendre des mesures visant à conférer le caractère d’infraction pénale à l’utilisation des services d’une victime, "en sachant qu’elle fait l’objet d’un trafic".

Cette criminalisation pourrait inclure juridiquement les employeurs de ressortissants de pays tiers en séjour régulier ou de ressortissants de l’UE, ainsi que les utilisateurs de services sexuels de toute victime de la traite, indépendamment de leur nationalité.

Dans les cinq ans, la Commission européenne doit soumettre un rapport évaluant l’impact des législations nationales existantes qui confèrent le caractère d’infraction pénale au fait d’utiliser les services de la traite des êtres humains ou qui visent à prévenir la traite des êtres humains. Ce rapport doit être accompagné, le cas échéant, de propositions appropriées.

Coordinateur de la lutte contre la traite

Le texte prévoit également la nomination d’un coordonnateur de la lutte contre la traite des êtres humains qui contribuerait également aux rapports de la Commission sur les progrès accomplis en matière de lutte contre la traite des êtres humains.

Cet accord sera soumis au vote du Parlement dans son ensemble lors de sa session plénière de décembre à Strasbourg. Les États membres auront deux ans pour transposer les nouvelles règles dans le droit national. La directive ne s’appliquera pas au Danemark et au Royaume-Uni, mais ce dernier pourrait encore utiliser un "opt-in" pour participer à la nouvelle réglementation à un stade ultérieur.

Résultats du vote conjoint des commissions Libertés civiles : et Droits des femmes : 51 voix pour, aucune voix contre et aucune abstention.

Sous la présidence de : Juan Fernando LÓPEZ AGUILAR (S&D, ES) et Eva-Britt SVENSSON (GUE/NGL, SE)

29.11.2010