L’adhésion de l’UE à la Convention européenne des droits de l’homme sur la lutte contre la traite des êtres humains garantirait « l’application uniforme de ses normes élevées et de son approche des droits de l’homme à travers toute l’Europe », ont déclaré le 3 décembre dernier les participants à la Conférence « les Parlements unis contre la traite des êtres humains », organisée à Paris par la Commission sur l’égalité des chances de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE).
A cette fin les participants ont décidé « d’aborder cette question dans leurs relations avec les institutions de l’UE, en particulier avec le Parlement européen ». La déclaration finale souligne que la mise en œuvre effective des dispositions de la Convention par les Etats parties est le principal défi à relever et « exprime la conviction des participants que les parlements nationaux doivent jouer un rôle actif dans le contrôle de cette mise en œuvre ».
Texte de l’appel de Paris
« La traite des êtres humains est une violation des droits de l’homme touchant des milliers de personnes en Europe, et dont aucun Etat membre du Conseil de l’Europe n’est à l’abri.
Etant sincèrement préoccupés par le problème grandissant que représente la traite des êtres humains, les participants à la conférence réaffirment la primauté et la pertinence de la Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains, en tant qu’instrument international contraignant fondé sur une approche des droits de l’homme et reflétant les normes les plus élevées pour assurer la prévention de la traite, la protection des victimes et de leurs droits, et la poursuite en justice des délinquants.
Ils expriment leur volonté de promouvoir la signature et la ratification de la Convention par tous les Etats membres du Conseil de l’Europe, et son adoption par des Etats non-membres du Conseil de l’Europe.
Ils conviennent que l’adoption de la Convention par l’Union européenne (UE) garantirait l’application uniforme de ses normes élevées et de son approche des droits de l’homme à travers toute l’Europe, et ils décident de désormais aborder cette question dans leurs relations avec les institutions de l’UE, en particulier avec le Parlement européen.
Les participants estiment que la mise en œuvre effective des dispositions de la Convention par les Etats parties est le principal défi à relever. Dans cette perspective, ils soulignent l’importance des travaux entrepris par le Groupe d’experts sur la lutte contre la traite des êtres humains (GRETA) et la nécessité de lui allouer les moyens nécessaires pour mener à bien ses actions de suivi.
En outre, les participants expriment la conviction que les parlements nationaux doivent jouer un rôle actif dans le contrôle de la mise en œuvre effective de la Convention, en complémentarité avec le GRETA, ainsi qu’assurer la conformité des Etats membres du Conseil de l’Europe avec les obligations imposées par la Convention européenne des droits de l’homme et liées à la question de la traite.
D’autre part, les participants rappellent le rôle essentiel joué par la société civile et par les organisations non gouvernementales qui, en servant de lien entre les personnes victimes de traite et les institutions, assurent l’opportunité et la pertinence des activités menées par des institutions nationales et internationales et contribuent à leur surveillance.
À la lumière des bonnes pratiques identifiées lors de la conférence, les participants recommandent aux Etats membres du Conseil de l’Europe les actions suivantes :
- signer et ratifier la Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains (s’ils ne l’ont pas déjà fait) et coopérer pleinement avec son mécanisme de suivi ;
- introduire des plans d’action sur la traite des êtres humains et travailler en étroite coopération avec les parlements à l’élaboration de ces plans, à leur mise en œuvre et à son suivi ;
- désigner un coordinateur national chargé de la lutte contre la traite des êtres humains ;
- mettre en place un programme national pour les victimes de traite, afin de créer à l’échelon national un système permettant de fournir une aide juridique, médicale, psychologique et financière
- envisager de pénaliser l’achat de services aux victimes de traite, ainsi que déjà recommandé par la Résolution 1702 (2010) de l’Assemblée ;
- délivrer des permis de séjour aux victimes de traite pour des raisons humanitaires, qu’ils coopèrent ou non avec les autorités dans le cadre de procédures d’enquête ou de justice ;
- considérer les anciennes victimes de traite en tant que « groupe social particulier » aux fins de la Convention de Genève de 1951 relative au statut des réfugiés ;
- veiller à l’harmonisation des moyens de preuves à l’échelle européenne ;
- signer et ratifier le Protocole de Palerme visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, additionnel à la Convention des Nations Unies contre la Criminalité Transnationale Organisée, et assurer la coopération avec les Nations Unies et ses organes spécialisés dans le domaine de la traite, en particulier le Rapporteur Spécial sur la traite des êtres humains.
D’autre part, les participants à la conférence recommandent aux parlements nationaux les actions suivantes :
- demander à participer systématiquement au suivi des mesures politiques et législatives prises en matière de traite des êtres humains, y compris pour la mise en œuvre de la Convention ;
- se montrer proactifs pour poser des questions parlementaires aux ministres en ce qui concerne la traite des êtres humains, ainsi que la mise en œuvre de la Convention et sa coordination avec d’autres instruments juridiques, notamment la future directive de l’Union européenne ;
- soutenir le travail du GRETA, en veillant à ce que ses experts nationaux nommés satisfassent aux conditions d’indépendance et de compétence ;
- exiger de leurs gouvernements qu’ils fournissent au GRETA les ressources humaines et financières nécessaires pour mener à bien son action ;
- demander à leurs gouvernements d’apporter une suite exécutoire rapide aux arrêts pertinents rendus par la Cour européenne des droits de l’homme et, en général, de se conformer à la jurisprudence pertinente de la Cour ;
- mettre en place des groupes/commissions parlementaires dédiés à la lutte contre la traite des êtres humains ;
- renforcer la coopération et le partenariat avec la société civile et les organisations non gouvernementales.
Les participants remercient les organisateurs de cette initiative et réaffirment leur volonté de coopérer à la lutte contre cette forme d’esclavage moderne. »