Je suis française, je suis née en France, j’y ai grandi, fais mes études, j’y ai mes amis. Je suis guinéenne, j’y vais en vacances, je connais les traditions.
Lorsque j’avais dix-sept ans nous sommes partis en vacances en Guinée avec mes parents ; rien d’anormal car nous y allions régulièrement. Lors de ce séjour ils m’ont présenté à un cousin avec un projet de mariage. Je ne souhaitais pas épouser un garçon que je ne connaissais pas et puis je voulais continuer mes études. J’ai pensé que mes parents allaient comprendre…
Mais comme je refusais ils m’ont séquestrée, frappée et privée de nourriture durant plusieurs jours. Ils avaient mon passeport et m’ont menacée de ne plus jamais retourner en France si je refusais. J’ai accepté le mariage… et les relations sexuelles.
Ce mariage forcé a est validé à l’ambassade de France lorsque je m’y suis rendue de force à dix-huit ans. Ma vie était détruite même si mon mari n’est pas venu tout de suite en France. Mais dès qu’il est arrivé j’ai essayé de trouver comment annuler le mariage ; mais on m’a dit que ce n’était pas possible. J’habitais avec ma famille et mon mari, je n’avais pas de ressources, j’étais bloquée.
Un jour où j’ai refusé des relations sexuelles avec mon mari il m’a frappé, devant la famille personne n’a rien dit.
C’est une amie qui m’a emmenée dans une association spécialisée contre les violences faites aux femmes. J’avais tellement honte d’avoir été mariée de force, de ne pas avoir pu dire NON ! J’avais peur d’en parler, que les gens me regardent comme une victime alors que j’ai toujours été un fille libre, joviale… ma famille ne comprend pas pour eux je refuse la « tradition ».
Dans l'association, j’ai trouvé un soutien, une écoute : ils m’ont aidé à faire les démarches pour partir du foyer familial, divorcer, j’ai même parlé à un officier de police qui m’a rassurée. Mais je n’ai pas voulu déposer plainte, c’est ma famille… J’ai repris une formation, je travaille mais cette histoire a laissé des traces…c’est dur d’en parler, de trouver quelqu’un qui comprenne ce que je ressens, d’être rejetée de sa famille…