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Exploitation sexuelle et traite des mineurs à partir d’internet

La crise sanitaire a favorisé le développement de la traite des mineurs sur Internet. Le recrutement de victimes s’est développé sur les réseaux sociaux et l’exploitation s’est de plus en plus virtualisée à travers des dispositifs toujours plus cruels.

Des mineurs particulièrement exposés

Les auteurs de traite à des fins d’exploitation sexuelle utilisent Internet pour recruter des mineurs. 

Lors des différents confinements, les enfants ont eu recours aux réseaux sociaux pour conserver leurs liens sociaux.

Cette exposition fréquente à internet a été exploitée par les auteurs de traite pour toucher davantage de victimes.

Virtualisation de l’exploitation

Face aux fermetures des frontières, les réseaux de traite transfrontalière se sont tournés vers la toile pour proposer d’autres formes d’exploitation rémunératrices. La pédopornographie et le live-streaming se sont ainsi fortement développés. Ce dernier phénomène permet à des pédo-criminels de commander et visionner en direct des agressions sexuelles ou des viols sur mineurs à distance, via le darkweb ou les réseaux pédophiles. L’organisation criminelle met en relation la victime et le commanditaire et exécute les commandes contre rémunération.

Les touristes sexuels, dans l’incapacité de voyager, se sont saisis de ces opportunités virtuelles.

Une exploitation à distance favorisant le passage à l’acte 

La virtualisation de ces formes d’exploitation crée une distance par rapport à l’acte criminel et sa gravité. Elle donne un sentiment d’irresponsabilité et d’impunité à l’auteur. 

Cela encourage des personnes qui ne seraient pas forcément passées à l’acte dans la vraie vie de le faire virtuellement.

Pour les réseaux de traite des êtres humains, cette virtualisation est une opportunité de toucher un public beaucoup plus large de « clients » internationaux.

Les ravages de ces formes d’exploitation pour les victimes

Internet ajoute une violence supplémentaire à l’exploitation. En plus de subir un abus sexuel, les images enregistrées peuvent être diffusées et revisionnées, ce qui rend le traumatisme encore plus cruel. 

Tant que le contenu n’a pas été saisi et définitivement supprimé, la re-victimisation est possible, et toujours très présente.

Un travail juridique de fond pour enrayer le phénomène

La société civile effectue un travail de contentieux juridique et se porte partie civile dans de nombreuses affaires concernant la traite en ligne afin de révéler la réalité de ce phénomène  et d’inciter les magistrats à qualifier juridiquement les faits en adéquation avec la gravité des faits. 

Au départ, le live-streaming était juridiquement assimilé à de la détention d’images à caractère pédo pornographique. L’implication de l’auteur dans l’exploitation du mineur n’était pas prise en compte alors que c’est bien lui qui passe la commande et la paye.

En janvier 2020, ce phénomène a été requalifié de complicité d’agression sexuelle sur mineur, ce qui représente déjà une évolution positive dans la lutte contre ce phénomène.

Accentuer la prévention et la sensibilisation

La société civile effectue des actions de prévention auprès des enfants, en milieu scolaire notamment, pour sensibiliser les enfants aux dangers d’internet et les aider à s’en servir de manière sécurisée.

Cependant, des actions de plus grande ampleur permettraient de toucher les mineurs, les parents, les professionnels travaillant avec les enfants, afin que tous soient informés et en mesure de se protéger face à ces formes d’exploitation.

Il serait également nécessaire d’encourager le grand public à utiliser les outils de signalement à leur disposition pour faire remonter le contenu illégal en ligne et ouvrir des enquêtes.

> Outil de signalement du Ministère de l’Intérieur

Impliquer les autorités et les acteurs privés dans la lutte contre l’exploitation en ligne

La France a besoin de développer les moyens techniques et humains mis à disposition des forces de l’ordre pour lutter efficacement contre le phénomène. Trop peu d’équipes sont dédiées à l’éradication de la traite en ligne.  

Par ailleurs, il serait utile que les réseaux sociaux s’impliquent et mettent en place des systèmes de détection afin de repérer les exploiteurs ou les criminels présents et agissant sur leurs plateformes.

ECPAT FRANCE

Membre du réseau international ECPAT (End Child prostitution, Child Pornography & trafficking of children for sexual purposes), ECPAT France (EF) est une association française créée en  1997 ;

elle a pour mission de prévenir et de lutter contre toutes les formes de violence et d’exploitation sexuelle des enfants, y compris la traite, en ligne et hors ligne. 

Ecpat France développe des projets en France et à l’international pour prévenir, protéger et réparer les droits des mineurs et les jeunes victimes. Elle porte une attention particulière à la participation et à la prise en compte des vues des enfants dans le développement et la conduite de ses projets.

 

Article écrit en collaboration avec Katy Diouf, assistante en plaidoyer et gestion de projet à ECPAT sur les programmes France Europe, et avec la contribution de Ludivine Piron, responsable de programme tourisme et 'online'