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Suivi de la mise en oeuvre de la Convention du Conseil de l'Europe contre la traite

Début février, le groupe de suivi de la mise en oeuvre de la Convention du Conseil de l'Europe contre la traite des êtres humains, le GRETA, a rencontré en France des associations spécialisées dans l’accueil des victimes de traite afin d’avoir leur retour d’expérience sur le terrain.  Le rapport périodique que réalise le GRETA sur chaque pays, avec sa vision européenne, favorise des avancées sur la prévention et la lutte contre la traite des êtres humains. 

Au delà des institutions rencontrées à Paris, Lyon et Rennes sur proposition du Gouvernement et de la Mission Interministérielle de lutte contre la traite des êtres humains, le GRETA a non seulement rencontré le Collectif et des associations à plusieurs occasions, mais aussi -en tête à tête- des personnes victimes dans différents lieux d'accueil associatifs.  Ainsi certains membres du GRETA ont rendu visite en soirée à des femmes hébergées par l'AFJ (association qu'ils avaient rencontrée il y a quelques années) et les membres de l'association ont pu partager leur regard sur la situation en France aujourd'hui tout en échangeant sur d'autres initiatives en Europe.

Des solutions d’accueil à développer pour assurer la prise en charge des victimes

Malgré les efforts et les évolutions de ces dernières années, la France reste en retard en matière de lutte contre la traite. Les solutions déployées pour accueillir les victimes sont encore insuffisantes. En France, les structures spécialisées dans l’accueil des victimes de traite font figure d’exception et sont largement insuffisantes au regard des besoins de prise en charge.
Pour les mineur(e)s, il n’existe encore aucune solution d’hébergement et d’accompagnement spécifique.

Une prise en charge conditionnée par la situation administrative des victimes
Aujourd’hui en France, la prise en charge des victimes de traite dépend de leur situation administrative. Pour les demandeurs d’asile et les réfugiés, il existe des dispositifs d’hébergement et d’accompagnement spécifiques. 

Mais aucune solution adaptée n’est prévue pour les personnes déboutées ou celles qui n’ont pas de droit, qui représentent une grande partie des victimes. Des dispositifs d’accueil adaptés à ces situations sont à développer.

Individualiser la prise en charge des victimes
Chaque victime, en fonction de sa situation, a des besoins d’accompagnement particuliers.
Certaines doivent être protégées du risque de représailles et très entourées quand d’autres nécessitent une prise en charge beaucoup plus libre, dans une démarche plus ouverte et autonome.

Les centres d’accueil spécialisés dans la traite doivent pouvoir proposer aux victimes, en plus de l’hébergement, un accompagnement sanitaire, psychologique, social et juridique qui puisse s’adapter aux besoins spécifiques de chacune d’entre-elles.

La protection des victimes en cours de procédure judiciaire
L’AFJ propose un hébergement et un accompagnement à des femmes dans un dispositif expérimental financé par l'Etat (un appartement sécurisant) afin de favoriser leur participation à la procédure judiciaire. Ce projet répond à un véritable besoin, mais ce type de mesure est absente du second plan national de lutte contre la traite.

Institutionnaliser la collaboration entre la société civile et les pouvoirs publics

L'AFJ travaille en lien avec des partenaires espagnols. Dans certains pays d’Europe comme l’Espagne, la coopération entre la police et les associations spécialisées est institutionnalisée. Lors des démantèlements, les policiers préviennent à l'avance les structures d’accueil et collaborent avec elles pour prendre en charge les victimes de façon adaptée à chaque situation.

En France, ce type de partenariat existe mais relève d’initiatives locales. 
Les objectifs principaux sont de créer une passerelle entre la police et les associations afin d’assurer une protection immédiate des victimes en cas de démantèlement ou de dépôt de plainte. 

La collaboration entre les instances judiciaires et la société civile mériterait d’être précisée au niveau national par les pouvoirs publics afin d’améliorer l’identification et la prise en charge immédiate des victimes.

Une meilleure implication des pouvoirs publics dans les initiatives associatives 

En France, le fonctionnement des associations spécialisées dans l’accueil des victimes de traite dépend majoritairement d’une multitude de financements privés à renouveler fréquemment. 

Cette situation financière est instable et ne permet pas de développer les structures sur le long terme.

Dans certains pays, comme la Belgique ou le Royaume Uni, les foyers spécialisés dans l’accueil de victimes de traite sont davantage financés par l’Etat. 

Cette participation des pouvoirs publics leur offre la stabilité nécessaire pour développer dans la durée des dispositifs d’accueil s’adaptant aux besoins des victimes.

L'association AFJ

C’est une association comprenant un foyer de mise à l’abri de 12 places et un appartement de 3 places à destination des femmes victimes de traite à des fins d’exploitation sexuelle.

Elle propose un accompagnement global des victimes : mise à disposition d’un hébergement, suivi administratif (ouverture des droits et régularisation administrative), suivi psychologique, actions éducatives d’insertion (apprentissage du français, accompagnement d’insertion professionnelle). Des activités sont proposées aux femmes au sein du foyer.

L’Accompagnement est effectué par une équipe de professionnels et des bénévoles. 


Article écrit en collaboration avec Yolanda Gutierrez, directrice d’AFJ