Coordination : Geneviève Colas - genevieve.colas@secours-catholique.org - 06 71 00 69 90

En marge des grands événements sportifs

Je m’appelle Lise, j’ai 19 ans.
J’ai grandi dans un environnement paisible et au sein d’une famille aimante.
Mais à 15 ans, ma vie a basculé et j’ai vécu des choses qui m’ont profondément marquée.
En voici le récit.

amara


Je suis en classe de 4e quand je change de collège. J’ai du mal à m’adapter dans ce nouvel établissement.
Alors, quand je suis invitée pour la première fois à une soirée chez un camarade de classe très populaire, je vois cela comme une chance de m’intégrer.

Le soir venu, je bois quelques verres alors que je n’ai jamais bu d’alcool.
L’heure avance et on commence à se lancer des défis. Au début anodins, ils deviennent de plus en plus tendancieux.
Quand arrive mon tour, le challenge est de se livrer à une pratique sexuelle devant tout le monde. Sous la pression des autres, je ne me sens pas de me défiler.
Seulement, quelqu’un filme la scène. Le lendemain, la vidéo circule entre les élèves du collège.

Tout le monde la voit, la commente. J’ai tellement honte que je n’en parle à personne. Je me sens terriblement seule.

C’est à ce moment que je commence à fumer du cannabis. Ça m’aide à ne pas y penser.

C’est alors qu’un homme de 25 ans nommé Hugo entre en contact avec moi sur les réseaux sociaux.
Il a vu la vidéo et me fait beaucoup de compliments. Il a envie que l’on se voie. Il me dit qu’il peut me faire gagner de l’argent.
De mon côté, j’en ai besoin pour acheter du haschich, alors j’accepte.
Lors de notre première rencontre, on boit et on fume ensemble. La suite, je ne m’en souviens pas.

Mais quand je reprends mes esprits, je me rends compte qu’il m’a violée. Je suis sous le choc.

Il me réconforte et me dit que je suis un diamant brut, que je peux me faire beaucoup d’argent avec lui. Ça me rassure et je lui fais confiance.

C’est ainsi qu’il m’apporte mes premiers clients.
Il me procure les lieux où les recevoir et m’achète de beaux habits. En échange, je lui donne une partie de l’argent que je gagne.

Je vis ainsi pendant un an, jusqu’au jour où mes parents s’en aperçoivent.
Ils essaient de me mettre en relation avec une association spécialisée, mais je n’en vois pas l’intérêt. Je gagne enfin ma vie et je ne demande rien à personne.

Alors je fugue chez Hugo.
Seulement, celui-ci change d’attitude. Il devient pressant, menaçant, violent quand je ne rapporte pas assez d’argent à ses yeux.
La situation devient dangereuse et je veux couper les ponts avec lui.

Je rentre alors chez moi et demande à mes parents de déménager.
Par la suite, j’accepte de me faire accompagner par l’association pour me reconstruire et changer de vie.

A

DES CLEFS POUR COMPRENDRE

L’exploitation sexuelle des mineurs est une des formes de traite des êtres humains. Elle correspond à une situation où une victime mineure va être contrainte, directement ou indirectement, à satisfaire les désirs sexuels d’autrui. Il y a « traite des êtres humains », dès lors que la victime exploitée est mineure, son âge suffisant à prouver l’existence d’une contrainte.

z

Qui sont les victimes ?

Les victimes d’exploitation sexuelle prises en charge par des associations sont des jeunes de moins de 18 ans, qui peuvent parfois même être de très jeunes enfants.

Ce sont souvent des jeunes filles qui se retrouvent en rupture familiale partielle ou totale, mais ces victimes peuvent être de toute nationalité et appartiennent à tous les milieux socio-économiques.

Cependant, elles ont la plupart du temps connu un évènement traumatique qui les a rendues particulièrement vulnérables aux prédateurs, comme du harcèlement scolaire ou un premier traumatisme d’ordre sexuel.… en faisant une proie idéale pour des prédateurs sexuels.

Comment les repérer ?

Il est difficile de repérer ces victimes, dont l’exploitation passe le plus souvent par des interfaces numériques.
Celles-ci permettent une exploitation rapide et démultipliée, et rendent l’identification des victimes compliquée.

Par ailleurs, les victimes mineures d’exploitation sexuelle se distinguent par le déni qu’elles ont le plus souvent de leur situation d’exploitation.
Il convient ainsi, en cas de repérage d’une potentielle victime, de tâcher de l’accompagner malgré l’absence de verbalisation de sa situation.

Chacun peut tenter d’identifier, en cas de rencontre avec une victime potentielle, un faisceau d’indices laissant soupçonner une situation d’exploitation sexuelle (hyper-sexualisation, condition physique inquiétante, fugues à répétition, dépendance toxicologique et numérique…).
Dans tous les cas, il est important de se tourner vers les associations spécialisées qui sauront vous guider pour orienter, ou accompagner le ou la jeune sans vous mettre en danger, l’enfant étant certainement lié à un réseau de traite.

Pourquoi ce phénomène en marge des grands événements sportifs ?

En marge des grands événements sportifs, l’afflux important de touristes augmente le risque d’exploitation sexuelle des mineurs. Le plus grand nombre de « clients » potentiels représente une opportunité pour les exploiteurs, organisés en réseau ou isolés, et attire de nouveaux groupes criminels. Pour les enfants, particulièrement vulnérables, le risque de devenir victime de traite est d’autant plus élevé.

Les auteurs de traite vont profiter de la forte hausse des recherches de faveurs sexuelles, pour augmenter considérablement leur chiffre d’affaire.
Cette hausse est liée à l’afflux massif de personnes dans un contexte particulièrement festif, ayant parfois un sentiment d’impunité, lié au déplacement, à l’exaltation des résultats de la compétition ou à la présence d’une « offre » de « prostitution ».
Les organisations criminelles vont donc recruter massivement de nouvelles victimes parmi les plus vulnérables, et donc beaucoup parmi les mineurs, pour couvrir les demandes.

> En savoir plus sur le sujet : "Agir contre l’exploitation en marge des grands événements sportifs"