Groupes de parole, danses, massages, pour apaiser le corps et l’esprit … Face aux troubles psychiques et sanitaires provoqués par la traite à des fins d’exploitation sexuelle et la prostitution, l’association « Aux Captifs, la libération » a créé le parcours « Santé Bien Être ». Destiné à inviter les victimes à envisager un suivi médical, il tend également à une meilleure prise en compte de leur corps suite aux traumatismes vécus.
Le parcours Santé Bien-Être s’adresse aux personnes rencontrées lors de maraudes réalisées en partenariat avec l’association ADSF (Agir pour le Droit et la Santé des Femmes) au Bois de Vincennes. Les personnes rencontrées sont souvent des femmes nigérianes, âgées de 18 à 35 ans, victimes de traite, contraintes à la prostitution. La plupart ont vécu un parcours de migration traumatisant, qui a duré de plusieurs mois à plusieurs années.
Pendant toute la crise du Coronavirus un lien a été entretenu avec la plupart de ces femmes.
Le parcours santé / bien être
Dans le but d’inviter les victimes à entreprendre un suivi médical et psychologique, et de favoriser la réconciliation avec elles-mêmes et autrui, le parcours Santé Bien-Être s’articule autour de trois axes.
Eveiller les consciences par des groupes de parole
Une conseillère conjugale et familiale anime des groupes de paroles sur le sujet de la sexualité. Actuellement, elle est camerounaise.
Elle aborde les idées reçues culturelles sans filtre, ce qui permet de sensibiliser concrètement les femmes sur les risques de la prostitution et de certaines pratiques à risque.
Selon les situations, elle évoque également l’estime de soi, les moyens de contraception..
La danse thérapie
Son but est de réconcilier les personnes avec leur corps et leur conscience, mais aussi d’inviter à la verbalisation des traumatismes, et de rétablir la relation affective ou amoureuse à l’autre. Pour cela, un médecin, un danseur professionnel congolais et une psychologue organisent et mettent en place des ateliers de danse thérapie. Ils partent de l’émotion du groupe pour créer une danse.
Cet exercice permet aux personnes d’aller au-delà du regard des autres, d’exprimer des ressentis à travers cet art, et d’avoir une approche positive de leur corps.
Les ateliers de massage bien-être
Une fois par mois, des sessions de massage d’une heure sont proposés aux personnes. Les effets d’apaisement sont immédiats.
Ces ateliers permettent aux victimes de découvrir des sensations agréables à travers leur corps, et que le contact avec autrui peut être positif et bienveillant.
Les fruits de cette approche
La fidélité progressive des participantes montre l’intérêt de ce type d’accompagnement.
La danse suscite un enthousiasme considérable des bénéficiaires. Un vrai noyau s’est constitué autour des groupes de parole. De nombreuses femmes en profitent pour réclamer des dépistages, des suivis médicaux, des bilans gynécologiques…
Cela démontre la prise de conscience des risques encourus et une nouvelle approche de leur corps, qu’elles veulent protéger et dont elles veulent prendre soin désormais.
Aux captifs, la libération
L’association Aux Captifs, la Libération est née en 1981 pour aller vers les personnes de la rue en situation de précarité à l’intérieur de Paris, aux Bois de Boulogne et Bois de Vincennes ; avec aujourd’hui 25 maraudes hebdomadaires à destination des personnes en situation de rue ou/et d’exploitation sexuelle ou de prostitution.
Elle a aussi des équipes bénévoles à Bordeaux, Lyon et Nîmes.
Le cœur de sa mission est d’aller à la rencontre des personnes sur leur lieu de vie et ou d’exploitation. L’idée est d’aider chacun et chacune à construire un projet de vie, notamment en sortant de la prostitution.
Les équipes de bénévoles et de salariés ont développé une expertise dans la rencontre, l’identification, l’accueil et l’accompagnement des personnes.
L’association propose également des permanences d’accueil et un accompagnement global à travers du travail social, de l’accès au soin et au droit en partenariat et un maillage associatif adapté.
Les propositions de l’association passant par la liberté de choix des personnes dans leurs parcours, l'association déploie des activités de mobilisation /dynamisation ainsi que des séjours de rupture, comme autant de leviers de reconstruction vers une capacité à l’insertion.
L’identification spécifique des victimes de traite aux fins d’exploitation sexuelle, mineures et majeures, est une priorité de l’association, ; tout comme la sensibilisation des pouvoirs publics et de la société aux problématiques liées à la traite.
L’association est agréée depuis trois ans par l’Etat pour accompagner des parcours de sortie de traite à des fins d’exploitation sexuelle et de prostitution.
Article rédigé en collaboration avec Jean-Marie Pelou, coordinateur de parcours de soin à l’association aux captifs la libération.